Que ce soir est beau, ce moment où ils dorment paisiblement l'un comme l'autre, où la flamme d'une bougie, la lumière d'une ampoule verte se marient pour dessiner ensemble de légers contours ombreux ... l'ordinateur émet un léger souffle qui reprend les leurs endormis ...

California dreams ... le bruit des touches ... il y a quelque chose d'appaisant qui me fait pleinement me sentir chez moi. C'est si rare ce sentiment de pleinitude en présence des autres, ne pas sentir leurs pensées heurter les miennes ...

Je retrouve mes mots, je retrouve ma plume doucement ...

Mon monde virtuel s'est vidé ... il tient à si peu ... ma réalité quotidienne s'est enrichie de présences ... nos présences respectives sont si précieuses aussi maladroites, hésitantes, candides puissent-elles nous paraître ... certaines choses dépérissent d'elles-même alors qu'elles n'ont pas même eu le temps d'être vécues, certaines choses s'inscrivent déjà profondément dans les lendemains alors qu'elles viennent seulement d'entrer dans le vécu ...

Pas de fioritures, pas de prétention, pas de faux-semblants ... la modestie et le naturel de l'être, la générosité unie à la simplicité dans le geste ... c'est si rare et si précieux ... c'est de l'humanité je crois, c'est de l'amour de la vie et de son prochain ...

C'est pour ça que j'ai cette prudence, parce qu'elle m'amène à cheminer paisiblement au long du sentier pour avoir le temps de voir arriver le visiteur plutôt que de courir à sa rencontre ... parce qu'ainsi on est certain que celui qui vient se poser doucement à notre côté, déposer timidement sa main près de la notre, plonger doucement son regard dans le notre, celui-là aura pris autant le temps que nous-même de peser son choix ... on me dira peut-être qu'ainsi on passe à côté de beaucoup de choses mais au fond je crois qu'ainsi ce sont surtout ces choses qui nous passent à côté ... et j'en viens à penser que ces choses, si elles sont si pressées qu'elles ne trouvent le temps de s'attarder n'ont peut-être en fin de compte rien à chercher dans notre vie ... si notre rencontre ne sait prendre ce temps de se faire à mi-chemin, alors peut-être est-ce qu'il n'y a pas réelle rencontre mais fugitive vision de celle-ci ...

Ce soir je ressens simplement la présence et l'absence ...

La première me met du baume au coeur et je relativise la seconde ...

Vivre simplement autrement et autre chose même si c'est pour reprendre la route demain ... parce que c'est ainsi que je pense arriver au terme de la route en me disant que je ne me serais pas enfermé dans une destinée ...

Alea jacta non est